Sommaire
Le métro mé pas tro

Yak Rivais. L'école des loisirs.


Voilà une version pour les élèves des Exercices de style de R. Queneau. Un moyen de faire comprendre que celui qui écrit peut faire des choix dans la façon de raconter son histoire, et qu'il peut en écrivant faire des «effets »- au lieu d'adopter un ton neutre et de ne se préoccuper que du contenu de l'histoire. Celui qui écrit n'a pas seulement à organiser son récit de façon hiérarchique (ce qui est important/ce qui est secondaire) ou de façon temporelle (ce qui s'est passé au début, et puis ...etc.), mais il peut proposer toutes sortes de gammes d'écriture dont il se fixe lui-même les règles en travaillant sur le type de personnage qui raconte ou sur le type de situation dans laquelle se trouve le narrateur.

a) Le travail se fait en groupes (3 ou 4 élèves). Chacun a un texte différent. Après une lecture silencieuse, chaque élève oralise son texte dans le groupe.
b) Un secrétaire est chargé d'écrire ensuite l'histoire commune (Où ? Qui ? Quand ? Comment ?) que le groupe essaie de retrouver à travers les différentes versions.
c) Chacun ensuite essaie de définir la spécificité de son texte par rapport à l'histoire commune, les changements qu'il observe d'un texte à l'autre. On peut au besoin ne pas donner les titres et demander aux élèves d'en trouver un pour chaque texte.
d) La mise en scène de ces petits textes est un prolongement intéressant dans la mesure où on dispose d'un lieu adéquat et d'élèves volontaires. Sinon, chaque élève prépare une lecture oralisée de son texte pour pouvoir le lire (le dire, éventuellement) devant le groupe-classe.

(Voici un extrait que l'on peut donner à un groupe.)


Voyou

 (Entre deux gendarmes.)

 

Dès la première plombe, je fonce turbiner dans le métro. Je me fade les barrières, hop-là! Je reluque les mémères, celles qu'ont des gros sacs à main. Je leur file le train, et dès qu'il n'y a plus un mec dans le secteur, je pique un sprint et j'accroche le sac. Je me casse à la vitesse d'un supersonique. Les gonzesses, elles crient « au voleur », mais je m'en fous. Je me calte. Après, je vide leur sac et je fourre les biffetons dans mes fouilles. Le malheur, c'est qu'il n'y a souvent que de la mitraille, et des fois des clo­pinettes. Alors je suis forcé de recommencer à chouraver des sacs. Je m'en farcis quatre ou cinq par plombe. Ce qui me botterait, ce serait de dégotter une bourgeoise rupine pleine aux as. Après, je me ferais honnête. Mais les rupines ne descendent jamais dans le métro. Elles roulent dans des tires de luxe avec des larbins qui pilotent. Le monde est mal foutu. (Il dévoile les menottes qu'il avait cachées jus­qu’ici:) Surtout aujourd'hui.

 

Sportif

(Il arrive en courant et continue de courir sur place ou de sauter.)

 

Hop! Hop! En petites foulées! Moi je fais mon footing dans le métro! Hop! Hop! Bon pour le coeur! En petites foulées! Je descends l'escalier quatre à quatre! Hop-là! Je saute les six dernières marches! Hop! Hop! Je ne suis pas de ces paresseux qui se posent sur un esca­lier mécanique en attendant d'être emportés comme des valises! Moi je fonce! Hop! Hop! Je shoote du pied droit dans les boîtes qui traî­nent par terre ! Je dribble les promeneurs! Je slalome! Je leur fais passer les boîtes entre les jambes! Hop! Hop! D'ailleurs, je saute aussi les barrières pour m'entraîner au saut de haies, bien que je possède une carte! Hop! En petites foulées! Une fois dans le wagon, je me sus­pends aux barres, je fais le drapeau! Ça épate les gens! C'est bon pour les joueurs de guitare, ils gagnent plus d'argent grâce à moi! Mais ça m'est égal! Ce qui compte, c'est de garder la forme ! Hop! Hop-là! (Il sort en faisant la roue.)

 

 

 

Xénophobe

 

J'en ai marre de prendre le métro! C'est plein d'étrangers! Des Portugais, des Yougoslaves, des Africains, des Turcs, des Monégasques, des Bretons, et que sais-je encore! Quand il y a un Français, tu le remarques tout de suite: c'est le seul qui parle comme tout le monde! J'en ai marre! Parce que figure-toi qu'il n'y a pas de place, et que les étrangers s'assoient quand même! Ils ne parlent pas français mais ils ont deux fesses, autant que toi! Et tu restes debout! Et t'es obligé d'entendre des tas de vagabonds américains, allemands, anglais, auvergnats, qui te chantent des idioties dans des jargons même pas de chez nous! Franche­ment, j'en ai marre!

 

 

Timide

 

Je… Voilà… J’y suis allé… J’ai vu des… Il y en avait beaucoup… Il y avait des…. Je n’ose pas le dire…. Après, je suis montré dans… Oui… J’étais debout…. Il y avait des … ( il fait semblant de jouer de la guitare)…. Je ne sais pas si j’y retournerai… Il y a trop de monde…